Mon année 2020, comme pour tout le monde, est bien chamboulée par le COVID. Les événements auxquel je devais participer en tant que coureur (Euforia et PicaPica) sont annulés. Invité à la fin de l’été par l’organisation de l’UTCAM et par Outdoor and News à tester le nouveau parcours de l’UltraTrail Côte d’Azur Mercantour qui a lieu dans les Alpes du Sud, je réponds favorablement avec enthousiasme, d’autant plus que je ne connais pas du tout le Mercantour, et que j’en ai eu de très bons échos.
Avant la course
J’avais eu de bons retours sur les tous premiers parcours, que l’on comparait parfois en 2015 à l’Echappée Belle, ma course coeur, sur laquelle j’étais de nouveau bénévole deux semaines auparavant après avoir surmonté 4 « intégrales » (le 149 km).
Moi qui apprécie particulièrement la caillasse, la promesse de technicité de l’UTCAM me réjouissait particulièrement.
Je ne me suis cependant pas renseigné plus que ça, préférant découvrir sur le tas et en abordant la course en tourisme. Tourisme en compétition, j’avais bien l’intention de me « taper dedans » pour cette première compétition depuis le confinement, et probablement la seule de l’année sur cette distance. Mais je n’ai pas étudié le profil, le tracé, etc, préférant m’adapter sur place.
Les derniers jours avant la course sont remplis d’incertitude (annulations d’événements en cascade, dont le Grand Trail de Serre Ponçon), mais l’organisation se veut rassurante.
Comme bien d’autres, elle a bien bossé pour proposer un protocole sanitaire et des garanties, mais elle dispose aussi a priori d’un soutien politique efficace.
Les lieux de départ et d’arrivée sont différents et bien que proche à vol d’oiseau, il faut une bonne heure de voiture de l’un à l’autre. Etant logé à St Martin Vésubie, l’arrivée, je prends une navette, un service mis en place par l’organisation (option à 10 €) pour me rendre sur le lieu de départ où se trouve également le retrait des dossards (le service de navette existe également dans le sens du retour).
L’attente est longue, car le départ se fait à 22h, et j’ai pris la navette de 14h. J’ai donc 7h à tuer, au Grand Pré de Levens. Sieste, goûté, sieste… Heureusement, il fait beau, et il y a beaucoup de place pour se trouver un coin tranquille dans l’herbe pour se reposer. Le retrait des dossards a été fluide, le matériel vérifié presque totalement mais j’avais prévu le coup en ne rangeant pas mon sac au mm près.
À 19h30, un concert met un peu d’animation et commence à nous réveiller. Il s’agit de reprises, notamment de rock, ponctuées d’anecdotes et autres détails culturels sur les groupes ou les époques.
Très sympa et le groupe joue et chante vraiment bien !
Un sac d’allègement à retrouver à la base vie du 60e, et un sac « streetwear » pour se changer à l’arrivée, peuvent être déposés. Je n’ai réellement besoin ni de l’un ni de l’autre, sauf pour garder mes affaires avec lesquelles je ne prendrai pas le départ : tenue civile avec laquelle j’ai pris la navette, nok & poudre pour les pieds, reste de nourriture, t-shirt & bière offerts avec le dossard… Que je place donc dans le sac streetwear.
Petit bémol : le sac doit être rendu pour 20h30, délai rallongé à « 21 h dernier carat ». Il reste 1h à tenir avant le départ sans sweetshirt alors que la température fraichie puisque la nuit est tombée.
Départ de l’UTCAM
Une première vague élite prend le départ, puis vont s’enchainer un nombre inconnu de vagues plus ou moins bien remplies, sans ordre particulier.
« Premier arrivé, premier parti », ce qui bien évidemment, fait que le 1 m de distanciation avant d’entrer dans le sas, après contrôle de température au pistolet, n’est franchement pas respecté.
Les coureurs accourent et s’agglutinent en effet pour partir dans les premières vagues, ce qui m’agace et annule l’effet attendu.
Il aurait fallu prévoir des vagues à l’avance, selon la côte ITRA par exemple (comme l’a fait l’Echappée Belle) ou le numéro de dossard.
L’organisation de l’UTCAM a misé sur une ambiance plutôt grandiloquente au départ, avec Vangelis comme à l’UTMB, des « lance-flames » sur les abords au passage des vagues, et une mise en avant particulièrement forte des élites.
Et des élites, il y en a un paquet, ainsi que de bons coureurs. ça part vite ! De plus, le 130 km et le 70 km ont départs communs, et l’ensemble des coureurs des deux parcours vont partager 60 km. Autant dire que « les 130 » risquent la surchauffe sur le début, d’autant plus que celui ci s’avère être, d’après moi, « très roulant ».
Certes, il y a du dénivelé, mais les chemins parfois larges, ou les sentiers plus étroits, offrent de nombreuses relances et ne sont pas bien technique.
Aussi il ne faut pas s’attendre à être particulièrement ralentis par le terrain, et la gestion du rythme doit être géré en conscience par le coureur dès le départ.
Quelques passages sont très plaisant malgré que l’on ne voit pas grand chose: sous la pleine lune, les passages en balcon laissent entrevoir le relief environnant, quelques étoiles, le tout dans une ambiance sonore sympatique dans ces endroits qui regorgent de vie.
Quelques longues heures plus tard, je trouve les passages en forêt un peu longuets. Néanmoins, le jour se lève alors que j’aborde la descente sur Roquebillère, la base vie du 60eme, et quelques fenêtres sur l’horizon offrent le spectacle de cimes dépassant d’un ciel bien coloré. C’est mignon !
La suite m’enchante beaucoup moins. Je subis mon rythme rapide sur la première moitiée, sur la suite du parcours dont je ne vois pas l’intérêt, outre « faire des bornes ». Une dizaine de km avec beaucoup de relance, en fond de vallée ou presque, sans paysage à contempler. Et de nombreux passages en bitume. Maintenant que le jour s’est levé, je trouve frustrant de ne pas être en altitude, dans des paysages spectaculaires.
La chaleur s’installe progressivement, tout autant que ma lassitude alors qu’un passage de 3km de bitume nous fait faire le tour du vallon pour nous rapprocher, après nous avoir éloigné, du ravitaillement / base vie du Relai des Merveilles, qui se trouvait tout proche à vol d’oiseau du pointage / ravitaillement liquide précédent.
La montée finalement avant le relai des Merveilles est rude, très raide, et sous un soleil de plomb, mais nous arrivons dans le Mercantour et je retrouve un terrain et des vues plus adaptés à mes exigeances ! C’est en effet bien plus joli à partir du 90eme km.
Je fais une longue pause à cette BV, avec un passage chez l’osthéo car j’ai une douleur au genou gauche depuis un moment: le fascia lata est trop tendu et a tiré un peu sur la tête du péronné, provoquant une petite tendinite, m’empêchant de relancer, courir, notamment en descente.
Au bout de l’effort
La fin va être terriblement longue, et je me prépare psychologiquement à passer l’Archas de nuit: le dernier sommet est réputé comme étant le plus difficile, et sa descente, tracée hors sentier cette année, particulière…
Avec patience et concentration, je continue ma progression avec un autre coureur qui comme moi va terminer à la marche. Nous avons un rythme similaire et formons un binome efficace. Papoter évite de s’arrêter, se morfondre, cela fait passer le temps dans les descentes qui nous semblent interminables.
Parfois, l’un de nous prend de l’avance, lui plutôt en montée, moi, plutôt en descente, mais nous retrouvons toujours un peu plus loin, au moins au ravitaillement, et partons ensemble.
Il est « du coin », et lors de nos échanges sur ce que nous pensons du tracé, il confirme mon impression qu’il doit être possible de faire mieux par endroits. La longue piste forestière puis le bitume ? Il y a un sentier qui arrive directement sur le ravito, ça passait par là, avant… Ah… bon… Il partage mon sentiment de lassitude face à certaines longueurs.
Pas question de se poser trop longtemps aux ravitaillements, malgré la gentillesse des bénévoles et l’acchalandage bien fourni, un peu de pasta-soupe et l’on repart.
Plus de 110km parcourus, je ne comprends toujours pas comment cette course a pu être comparée à l’Echappée Belle, ni même que l’on puisse attribuer le qualificatif « technique » aux sentiers empruntés.
Si une bonne partie des sentier présentent des petites pierres qui peuvent rouler sous les pieds, on est là sur ce que l’on peut attendre typiquement d’un trail en moyenne montagne, à mon sens.
C’est d’ailleurs une excuse de moins à mon ralentissement retentissant 😀
La montée à l’Archas nous parait durer une éternité, mais ce ne sera rien comparé à la descente. A petit rythme, mais en limitant au maximum les pauses et en papotant, nous arrivons en petit groupe de 6 ou 7 au sommet. Les derniers décamètres sont raides, mais rien de compliqué.
Puis nous découvrons la descente hors sentier vers la Colmiane, le dernier ravitaillement, et c’est alors l’incompréhension. Cette nouveautée, ce tracé hors sentier, était sensé être bénéfique aux coureurs, proposé en alternative à un sentier « trop raide ».
Celui ci n’est pas « trop raide », mais je cherche encore la simplicité et le confort pour des coureurs avec 120km dans les jambes. Outre l’attention nécessaire pour suivre le balisage, il faut lever les jambes, faire attention à ne pas glisser dans l’herbe humide, passer de gradin en gradin, tournicoter entre pierres et végétation… On avance pas ! Et on ne prend aucun plaisir.
C’est pourtant typiquement le genre de chose qui m’amuse d’habitude, mais placer ça au 120ème quand on est « fraccass », après une très grande première partie de parcours très roulante qui nous a épuisé, je ne comprends pas ! Et je ne suis pas le seul : autours de moi, même combat.
Ce sera même une question réccurente à l’espace repos / repas à l’arrivée: « vous en avez pensé quoi, de la dernière descente ?! »
Une fois le hors sentier terminé, le caractère interminable de cette fin de parcours ne prend pas fin pour autant. Longue est la suite sur une sente peu entretenue, puis une piste, puis l’environnement de la station de ski, puis un sentier plus raide pour atteindre finalement St Martin Vésubie. Il faut dire que la descente finalement, depuis le Mont Archas, fait aux alentours de 1 500 m !
L’arrivée
Je passe la ligne d’arrivée vers 3 h du matin. Des bénévoles aiguillent en ville toute la nuit. Si à cette heure le public est évidemment absent, les lance-flames sont là, comme à au départ, pour mettre l’ambiance.
La récupération du sac streetwear est super fluide, la douche est vite prise dans l’espace repos proche de l’arrivée, dans le complexe piscine/sport géré par l’UCPA.
Les kinés/osthéos sont à l’oeuvre toute la nuit, je profite donc de leurs soins et fini par m’endormir sur la table de massage 😀
Vu le peu d’affluence, ils me laissent en profiter et ce n’est que plus de 2h plus tard que j’ouvre naturellement les yeux.
Après plus de repos au logement, il m’est possible de profiter de l’espace détente du complexe avec le sauna (ou le hammam) et de déguster le repas après course tout bonnement exceptionnel.
Géré par le Refuge du Dahu (refugio Dahu, des Italiens), je m’offre un menu gargantuesque et de qualité : pizza (maison) 4 parts de saveurs différentes, viandes (saucisse/merguez/poulet) au BBQ, pâtes italiennes faites main sur place, planche fromage & charcuterie & pain italiens… Et un petit génépi pour bien digérer !
Fabuleux !
L’UTCAM : mon avis sur la course
Organisation générale très positive, ça semble rodé, c’est fluide au retrait des dossards, le service de navette est pratique, les ravitos bien fournis et bien tenus. Il faut noter que 4 ravitaillements sont même de niveau « base vie » avec de quoi se reposer, la présence d’osthéo, vrai repas chaud…
L’ambiance de départ et d’arrivée et le type de parcours, ainsi que le nombre de BV, démontre plutôt la volontée d’offrir un événement qui se veut (malgré la distance !) « accessible » et populaire.
Cela me fait bien plus penser à l’UT4M, par exemple, qu’un ultra plus « montagnard » qu’il soit à grands moyens déployés (comme l’Echappée Belle) ou plus « course au jambon » comme l’Ultra Tour du Beaufortain, pour ceux qui connaissent.
Un effet COVID a joué c’est certain, mais l’organisation déroule le tapis rouge pour l’élite, ce qui amène de belles bagares aux avant-postes et un plateau important.
Le repas d’après course est incroyable : non seulement on peut s’y sustenter à sa faim (ce qui n’est pas toujours évident après un ultra, selon les courses), mais en plus les Italiens du refugio Dahu nous régalent de produits de qualité et de fait maison.
L’espace repos est également très pratique et agréable. La présence des kinés/osthéo à toute heure du jour et de la nuit, le sauna ou la piscine, permettent une récupération optimale.
Deux points sont à améliorer cependant, dont l’un n’est pas des moindres à mon goût :
– LE DÉPART
* si les vagues sont maintenues, il serait bon de les préparer à l’avance (côte ITRA, numéro de dossard, autre ?) pour éviter la bousculade du « moi d’abord »
* faire partir les deux formats 70km et 130km me parait discutable
– LE PARCOURS SURTOUT !
J’ignore les contraintes auxquelles doit faire face l’organisation (typiquement le Parc du Mercantour n’autorise pas le passage de la course, mais il doit y en avoir bien d’autres) mais à mon sens, il est possible de faire bien plus cohérent, agréable. Il y a beaucoup trop de bitume à mon goût, et des longueurs de pistes forestières ou sans intérêt.
D’après moi, le tracé hors sentier de l’Archas part d’une bonne intention mais est une erreur, à ne pas renouveller. Pimenter un peu le parcours, pourquoi pas, mais pas au 120ème km (ce n’était d’ailleurs pas le but), et sans connaitre la raideur du sentier remplacé, je crois pouvoir certifier que ce n’est en aucun cas préférable.
Merci à Outdoor and News et à l’UTCAM de m’avoir permis de tester ce parcours, et un grand bravo pour le travail effectué ayant permis un maintien de l’événement dans ces conditions très particulières !
Rédaction : Sébastien BOCAHU
Crédits photos / Carole PIPOLO et ORGANISATION
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