Participer à une course, en période de Covid, ce n’est pas chose aisée. Beaucoup d’hésitations, puis enfin on se décide, on va tenter d’accrocher le dossard sur une course prévue début du mois d’août.
Mais sera-t-elle maintenue ? Le risque est grand, au vu des annulations en cascade, que la course soit annulée. Une bien grande déception pour l’athlète et sa longue préparation
Mais quelle importance réellement pour le monde ? Ne pas s’aligner sur une course, aujourd’hui, dans cette période de tourment mondiale, n’est-ce pas le dernier des soucis ? Ne peut-on pas se contenter de magnifiques OFF – seul ou en petit groupe, sur les magnifiques sentiers dont on dispose en France ? (Mer – montagne – champs – forêt ou bords de rivières…).
Ceci étant dit, plus concrètement, j’étais impatient de participer au Trail des Hauts-Forts, et grâce à une équipe hors-norme et à une abnégation incroyable – merci l’office du tourisme de Morzine-Avoriaz, Bruno ou encore Sara, Organisateurs de cet incroyable événement, qui nous confirme enfin, quelques jours avant le départ, la tenue de l’événement (et ceci malgré une dernière réunion avec le préfet en début de semaine laissant planer un gros doute jusqu’au bout).
L’organisation du Trail des Hauts-Forts
Des précautions spéciales en raison du Covid
Cela n’a pas été facile pour les organisateurs, car ils ont dû se plier à de nombreuses règles pour garantir la sécurité sanitaire lors de l’événement. C’est sûre, les courses en 2020 ne seront pas comme les autres. En voici, pour les curieux, et autres organisateurs de course en 2020, les grandes lignes visant à limiter les interactions entre coureurs et les interactions entre coureurs et bénévoles :
> Retrait des dossards
Port du masque obligatoire.
Respect de la distance d’un mètre dans la file d’attente.
Gel hydroalcoolique à disposition avant de retirer votre enveloppe.
> Départ
Départ par vague de 100 coureurs, toutes les 5 minutes.
Port du masque obligatoire dans le sas de départ
> Parcours
Modification de quelques portions du parcours afin de séparer les parcours et éviter les sentiers trop étroits où les dépassements ne sont pas possible sans une trop grand promiscuité.
> Ravitaillements
Pas de ravitaillement solide sur le parcours.
Une ration alimentaire est distribuée au retrait des dossards.
Ravitaillements liquides seulement, en bouteilles d’eau individuelles.
> Arrivée
Masque obligatoire après le passage de la ligne d’arrivée
Le plus difficile, dans ces consignes, c’était probablement d’envisager un 50 km avec près de 4000 m de dénivelé, sans ravitaillement solide, et avec comme simple boisson, des bouteilles d’eau. Mais n’est-ce pas, d’une certaine façon, un retour aux sources du trail qui se veut plus puriste et en autonomie quasi totale ?
Il s’avère tout de même que ce principe semble nettement plus envisageable pour les coureurs élites qui boucleront le parcours entre six et huit heures – Que pour le milieu ou fin de peloton terminant la course après 11 heures d’efforts sous une forte chaleur presque caniculaire. Mais à ce stade là, l’organisation permettant aux accompagnants de ravitailler les coureurs dans quelques points précis du parcours, je compte donc sur ma compagne pour me rapporter un peu de coca et quelques tucs qui me permettront, je l’espère, de tenir le coup jusqu’à la fin.
L’avant-course
Le vendredi 07/08/2020, veille de course, Nous partons en direction du retrait de dossard – Le masque est de vigueur, et tout semble être parfaitement cadré pour assurer la sécurité de tous. Car le lendemain, c’est tout de même quatre formats différents de courses qui s’élanceront à partir de 5h45 du matin.
Un 23 km, La course la plus populaire, Un 40 km, et enfin la distance reine : le 50 km sur laquelle j’ai prévu de m’aligner, avec possibilité de le faire en relais de 30 puis 20 kms. Au total, nous serons prêts de 900 partants, sur les 1000 prévus, certains ayant décidé d’annuler leur déplacement car la course fût encore incertaine jusqu’à quelques jours du départ.
Pour ma part, grâce à l’aide de l’office du tourisme, je suis logé à l’hôtel le tremplin situé en plein cœur de Morzine. J’ai décidé de faire le déplacement avec ma compagne, ainsi que ma toute jeune fille de trois mois, et mon chien, un intrépide Border collie, mascotte d’Outdoor and News. La veille de course se passe normalement, sans excès, j’ai décidé, car le format est assez exigeant, d’arrêter l’alcool et le café près d’une semaine avant le départ. Et je suis fier d’avoir tenu.
Toutes les courses seront au départ de Morzine. Elles se terminent toutes à Avoriaz, à 1800 m d’altitude. Pour mon épreuve, le 50 km, l’’itinéraire franchit plusieurs cols et sommets en tournant autour des Hauts-Forts, parcourant les plus beaux sentiers des Portes du Soleil.
Au programme : les crêtes du Pléney, la Pointe de Nyon, la Vallée de la Manche, le lac des Mines d’Or, le col de Cou à la frontière Suisse, l’aérienne arrête du Vanet, le col du Fornet avec vu sur le Mont Blanc, l’alpage de Morzinette et la redoutable montée des Prodains…
Le samedi matin, je partirai dans la première vague à 5h45, avec les élites. Nous sommes une centaine de participants, classés en fonction de notre côte Itra. La deuxième vague partira à 5h50 puis 5h55 puis six heures. À l’arrivée les résultats seront données, avec des pénalités correspondant au temps d’avance sur la ligne de départ de chacun des différents coureurs.
Trail des Hauts-Forts : récit de la course
La nuit est courte, je sens dès le réveil, que l’arrivée d’un bébé en bas âge, depuis seulement 3 mois ne me permettra sûrement pas de prendre le départ avec le maximum de repos. Et comme on s’apprête à partir sur les sentiers entre 8 et 9h, il va falloir avoir du mental ! Je quitte l’hôtel et descends vers le sas de départ, avant que le speaker ne lance les hostilités.
Bam. C’est parti. Nous quittons très rapidement le village de Morzine, pour nous élever, par le biais d’une piste assez large, au sommet de notre première ascension : le Pleney. Je suis surpris, car les premières minutes de course s’effectuent dans le noir total, avec pour seule lumière, l’éclairage de la lune. Le fait d’être parti 15 minutes avant l’heure officielle de départ, six heures, nous entraîne dans un début de course nocturne.
Une progression délicate où il ne faut pas chuter – car nous sommes tous sans lampe frontale – une difficulté supplémentaire qui nous permettra d’apercevoir le lever du soleil au sommet de la première ascension. Je sens très rapidement que la course va être longue, les sensations ne sont pas idéales, et l’avant de la course part très vite, à tel point que les premiers kilomètres de montée se font au courant, malgré une pente conséquente.
Le fait d’habiter en Île-de-France et de m’entraîner en vallée de Chevreuse, ne me place forcément pas dans la tête de cette course. Les poumons me brûlent. Bien qu’étant habitué à la tête de courses sur des formats plus roulants – je sais qu’ici – je suis venu pour en prendre plein les yeux et profiter de la beauté des portes du soleil. J’oublie alors tout de suite mon côté compétiteur et me cale dans un rythme qui est le mien – pour ne pas me cramer dès la première ascension. (1200m de d+ en deux bosses de 600m sur les 10 premiers kms).
Au sommet de la deuxième bosse, le soleil se lève enfin, et la première descente prend forme avec presque 6 km, sur des chemins techniques. Et la, mauvaise surprise, mon bâton droit se casse dans un caillou. Le coup au moral est terrible, comment vais-je pouvoir terminer cette course et ce dénivelé sans bâton ? Durant les premiers kilomètres je m’affaire à bidouiller le bâton pour qu’il puisse encore m’être utile. Au final : un brin fera 130cm, l’autre 115! Un déséquilibre qui en fin de course me vaudra un bon mal de dos.
Heureusement, après tous ces soucis, le premier ravitaillement apparaît au loin – km14. Avec le COVID, Les ravitaillements sont uniquement composés de bouteilles d’eau. Je puise alors dans mon sac – pompote et pâte d’amande – car je sens le coup de mous arriver. Si tôt dans la course ? S’en suit, dès la fin de la descente, un long faux plat montant dans la forêt.
Les écarts sont faits, je me retrouve tout seul, au milieu des bois, nous sommes au 20 ieme kilomètres et je lutte pour relancer. Je suis habitué à un coup de mou vers le 30ieme. Là, c’est vraiment tôt, nous sommes à peine au 18ieme km. Une solution : faire le dos rond. Apres m’être fait doublé par quelques coureurs, je trouve enfin la force de relancer (23ieme km) sur une bosse de 800 m de d+ en compagnie d’un relayeur du 50kms. Je sais qu’après ces quelques centaines de mètres de dénivelé jusqu’au refuge de la chardonnière, s’amorcera la descente vers le lac des mines d’or, prochain ravito, ou j’ai prévu de me poser 10 min pour réorganiser mon sac et puiser dans les dernières bars et compotes que j’ai sur moi.
La descente s’effectue, les cuisses tirent mais j’arrive assez vite en bas. Je repars, déjà quatre heures de course. La suite s’annonce particulièrement difficile avec une longue ascension, en plein soleil, la canicule pointe son nez, il est à peine 10h et il fait déjà 25 degrés. Direction la pointe du Fornet. La montée est raide, je suis obligé de me poser 2 minutes au milieu de l’ascension, car les jambes brûlent. Cette partie la du parcours paraît interminable. L’espoir, c’est qu’au sommet, un ravito avec … de l’eau gazeuse nous attend. Un vrai bonheur pour changer un peu de l’eau plate. Nous descendons par Chavanette sur un sentier assez large, choisi par l’organisation car nous sommes dorénavant sur un parcours commun avec le 40 et 23. Les pierres roulent sous nos pieds, nous déballons une piste rouge puis bleu à toute allure jusqu’a toucher Avoriaz. Là, un dilemme s’offre à tous les coureurs du 50 km : Monter au centre du village et terminer le 40 km. Ou passer par le ravito et continuer sur une boucle de 11 kms.
Nous sommes déjà à 40 km et prêt de 3000 m de dénivelé positif. Le moral est là, et après une pause de 10 minutes, ma compagne me rejoint pour m’apporter un ravito un peu plus complet (tant pis pour la perte de 10 places) à base de coca – tucs et brownie. Que du léger mais, à ce moment là, c’est un ravito plaisir. La suite, un faux plat montant en plein soleil, sous presque 31 degrés, puis une interminable descente jusqu’au Prodains. Les cuisses brûlent je n’en peu plus, en région parisienne, je ne peux m’entraîner suffisamment dans de longues descentes, et casser de la fibre, alors là, après 8h d’effort, le corps est à bout. J’ai hâte de terminer ce parcours d’autant que sur la fin nous remontons – enfin je vais pouvoir marcher.
Dernier ravito 47 ieme kms, les bénévoles sont adorables, j’ai même le droit à une petite banane sortie de nul part ! Ils me préviennent : la suite c’est 3km pour 650 de d+ en grande partie en plein soleil. Ça va être long. Alors je décide de mettre un podcast sur mon portable, (course épique) histoire de passer un peu le temps en me divertissant. Et ça marche super bien. Je galope. Je double même un concurrent Anglais qui, à 2kms de l’arrivée, au milieu de la pente, semble vouloir faire demi-tour pour redescendre. Surpris, je lui demande alors ce qu’il se passe ? Il est à mon sens impossible d’envisager abandonner si près de la fin de la course. Pour lui c’est tout autre, depuis déjà plusieurs kilomètres, il ne peut plus boire ni manger et a vomi à de nombreuses reprises. Nous discutons un peu, puis le malheureux repart vers le fond de vallée, si près du but. En trail, une course n’est jamais terminée tant qu’on n’a pas franchi la ligne d’arrivée. J’espère qu’il reviendra l’année prochaine pour boucler le parcours.
Arrivés en haut de la bosse, il nous reste les 500m de la traversée d’Avoriaz. Je marche et savoure. Quel bonheur.
MA compagne, mon chien et ma fille passent la ligne d’arrivée avec moi en 08h45 et 67 ieme place
(Pour la petite anecdote, les dossards ont été attribué en fonction de la côte Itra de chacun – j’étais le 66, ordre bien respecté). Je suis réellement satisfait de cette course qui était celle avec le plus de dénivelé pour moi. Des paysages somptueux et un retour aux sources du trail avec des ravitos allégés au maximum. L’année prochaine, pour sûr, je reviendrai. En attendant, prochain objectif à plat avec le grand raid de Camargue fin septembre.
REDACTION ET PHOTOS : ANTHONY BINST
Pour le déroulé de la course :
Sportif de Morzine-Avoriaz, Alexis Sevennec imprimait dès le départ un rythme infernal, et à mi-parcours, au niveau de Chardonnière, il pointait dix minutes devant son principal poursuivant, Nicolas Pianet. Sevennec restait en tête du grand parcours durant 47 km, mais il lui manquera quelques minutes de courses pour l’emporter. Nicolas Pianet le dépasse dans la dernière montée des Prodains, et franchit la ligne en vainqueur en en 05:47:34, 3 minutes devant Alexis. Coté femme, c’est Estelle Patou qui finissait en tête à 07:06:34.
Les classements complets de la course sont en ligne :
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