SARA 112 : l’application au service des coureurs

En test sur les deux dernières éditions du Grand Raid de la Réunion, l’application d’assistance aux coureurs en danger SARA 112 vise à se développer et s’exporter au delà de l’île de la Réunion. Entretien avec Romain Pagès, le fondateur de l’application.

  • Pouvez-vous nous parler du lancement du projet, pourquoi avoir lancé ce genre d’application ? Y-a-t-il eu un événement déclencheur particulier ?

Avant j’étais pompier de Paris. Lors d’une intervention, une jeune femme d’une trentaine d’année était en arrêt cardiaque. Il y avait du monde autour, des amis et des inconnus. Personnes n’a osé faire les gestes de réanimation par peur ou parce qu’ils ne savaient pas les faire. Hélas, malgré notre intervention, la jeune femme est décédée, elle s’appelait Sarah.  Les gens autour ont filmé. Dès lors, j’ai commencé à réfléchir à une solution qui soit capable d’encourager ceux qui connaissent les gestes et guider ceux qui ne les connaissent pas.
Aujourd’hui, cette application est brevetée et disponible sur l’Apple store et le Play store.
Le contexte de l’arrêt cardiaque fait une liaison directe avec le monde du trail et des ultra-trail. Plusieurs courses ont hélas vu des coureurs s’effondrer. En intervenant rapidement, on améliore les chances de survie de la victime. Chaque minute de perdue, c’est 10 % de chance en moins de survivre. Sur une course de plusieurs kilomètres, impossible d’avoir un secouriste à chaque kilomètre, et c’est presque impossible d’avoir une équipe médicale présente en moins de dix minutes sur l’ensemble de la course. D’où l’idée de faire participer dans un premier temps le témoin de l’arrêt cardiaque. Le pire scénario dans ce cas de figure, c’est de ne rien faire.

Version cliquable de l’application à tester gratuitement : cliquez ici

  • Qui travaille derrière l’application SARA 112 ?

    Moi (Romain Pagès), je suis le porteur du projet, non seulement celui qui a eu l’idée et qui la porte. Je suis aller chercher du soutien auprès de la TECHNOPOLE de la Réunion avec qui j’ai pu bénéficier d’une subvention pour lancer le développement de l’application avec une société externe. Concernant les contenus vidéos, j’ai eu la chance de travailler avec la Brigade de sapeurs-pompier de Paris, afin de développer une vidéo totalement spécifique concernant le guidage au massage cardiaque. Désormais, nous travaillons avec les hôpitaux universitaires de Genève et demain peut-être ceux d’Andorre.

  • Décrivez-nous les points forts de cette application

Le  premier point est que l’application est à destination de tous, que l’on soit formé ou non aux gestes qui sauvent. C’est parce qu’elle est guidée à distance par les service d’urgences que cela est possible. Une fois l’appel lancé, c’est eux qui auront la main sur les fonctionnalités de l’application.

Ce que fait l’application :

La géo-localisation de l’appelant. Au moment de l’appel, votre positionnement GPS est envoyée aux services de secours. Ce qui facilite le travail des secours notamment lors d’ultra-trails. Je dois d’abord savoir où est le coureur avant de savoir quels soins je vais pouvoir lui prodiguer.
La prise de photos ou de vidéos. Cela nous permet de visualiser de manière concrète la situation, la blessure ou le coureur. C’est un véritable atout pour les médecins ou infirmiers. Une image vaut mille mots… C’est particulièrement vrai dans ce cas.
Le guidage aux gestes de secours. Une fois l’évaluation faite et si la situation le nécessite, il est possible pour le service d’urgence de déclencher une vidéo des gestes d’urgence à réaliser. Les vidéos sont didactiques et spécialement conçues pour que chacun puisse les reproduire.
L’alerte de secouristes à proximité. En cas de besoin, il est possible d’alerter les secouristes à proximité afin qu’ils puissent apporter leur aide. Il est également possible d’envoyer une notification aux utilisateurs de l’application afin de demander leur aide ou les prévenir d’un danger.
  • Pouvez-vous aborder les premiers retours que vous avez eu suite aux tests grandeur nature sur les éditions 2018 et 2019 du Grand Raid de la Réunion ?

Nous avons eu la chance de pouvoir déployer SARA 112 lors des grands raids 2018 et 2019.
Lors de ses deux éditions, je me suis immergé dans la coordination médicale de la course entre les infirmiers(ères) et les médecins. Je leur faisais découvrir l’outil et eux m’apprenaient la complexité de leurs tâches. En plus d’un accueil chaleureux, j’ai beaucoup appris auprès de toute l’équipe. Ils font un travail de dingue (24h/24h durant toute la durée de la course), on ne se rend pas compte !
Le premier point frappant, c’est le besoin de connaître la position de l’appelant. C’est l’une des premières questions que l’on pose, mais sur les sentiers les réponses ne sont pas toujours évidentes. Il n’y a pas de nom de rue… Et même si je connais le sentier sur lequel je suis, il peut être long de plusieurs kilomètres. Parfois les coureurs ne sont pas de la région et n’ont même pas de point de repère. Et la nuit… c’est encore plus compliqué. Justement, beaucoup d’appels ont lieu la nuit (on est plus fatigué, il fait plus froid, on voit moins bien et puis la nuit crée un stress supplémentaire). 
Lors de la première édition, un homme s’était cassé la jambe dans Mafate (une zone accessible à pied ou en hélicoptère). Il avait quitté le sentier et ne savait pas nous dire où il se trouvait. Nous avons pu lui faire télécharger l’application, le géolocaliser et grâce aux coordonnées GPS faire partir l’hélicoptère. Sur l’édition 2019, nous avons pu fournir à l’hélicoptère des coordonnées GPS à trois reprises. Désormais, on demande aux équipes de secouristes sur le terrain d’installer également l’application. Si chaque coureur l’installe, la prise en charge médicale serait grandement simplifiée et améliorée.
  • Comment voyez-vous l’évolution de Sara 112 ? Le déploiement sur les courses en Europe est-il le prochain objectif ?

À l’origine, SARA 112 est dédiée au « grand public » à « la vie de tous les jours ». Nous réfléchissons donc à la création d’une version dédiée au trail, et plus particulièrement de l’EVENT qui serait toujours gratuite. Elle devrait voir le jour d’ici la fin de l’année. Clairement la réponse est OUI. C’est d’ailleurs notre objectif de nous diriger vers d’autres courses. Nous espérions pouvoir le faire cette année, mais le contexte COVID et les annulations rendent les choses difficiles.
Nous serons sur l’édition 2020 du grand-Raid (sauf annulation de la course). Mais nous souhaiterions vraiment participer et assister d’autres événements. Je pense bien sûr à nos courses en France (UTMB, Trail de France, les templiers et toutes les autres), et pourquoi pas, être sur les étapes du World Trail Tour.
Cependant, l’application est également déployable sur des courses plus modestes et également sur d’autres types d’événements. Nous serions d’ailleurs ravis de pouvoir échanger avec les organisateurs d’événements afin de répondre à leurs questions.

Merci à Romain Pagès pour ces explications. Et n’hésitez pas à télécharger l’application en cliquant ici

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Rédaction : Julien Frenoy

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