ALLEZ, JE FAIS 5 ULTRAS AVANT MES 50 ANS…

C’est de là que tout est parti. Juillet 2016

j’attaque mon premier ultra avec la X-Alpine de Verbier (111km). J’enchaîne en octobre avec la Diagonale des fous à la Réunion. Un truc de dingue mais je suis finisher sur les deux et c’est le pied ! Ma saison 2017 se conclut par la Swisspeaks 170km première édition avec une météo digne d’un jour pourri au fin fond de la Norvège où même le Père Noël ne mettrait pas un renne dehors… Passage de col à plus de 2500m avec 15cm de neige fraîche et un vent à décoller les bouses des vaches. C’est franchement limite et bon nombre de coureurs en shorts et five fingers font demi tour. Moi je suis quasiment dans mon jardin, donc je serre les dents et réussi à passer avec deux blocs de glace aux pieds et des moufles aux mains façon Mike Tyson ! L’organisation a fini par stopper la course mais heureusement pour moi, j’avais déjà fais plus de 100km… Donc troisième ultra réussi et 5 points Itra en poche.

Fin de l’hiver dernier, je jette mes skis au garage! pour moi pas de Patrouille des Glaciers cette année, mais au contraire, du chaud, du très chaud. Je viens de payer mon inscription au Marathon des Sables donc va falloir assurer. L’aventure fut à hauteur de mes espérances. J’en ai un peu « chié » le premier jour… La nuit précédent la course je me suis totalement vidé et déshydraté… Merci la salmonellose !!!! Six jours plus tard, c’est Monsieur Bauer en personne qui me tend les bras avec ma médaille de finisher.

A peine mon quatrième ultra terminé, je décide de m’inscrire à la Swisspeaks 170km 2018 histoire de la finir et avec le soleil cette fois-ci. Et me voilà, ce vendredi 7 septembre sur la ligne de départ à Pralong pour ma ballade de deux jours et deux nuits à travers mon beau Valais. C’est parti, le cœur léger, la boule au ventre disparue, je gambade à travers les prés sautant de cailloux en cailloux.

Ça discute, ça rigole et cette première montée se passe en douceur. Je bascule côté Grand désert et les premiers râleurs se font entendre…

« C’est pas des chemins, jamais vu ça, des trails avec autant de rochers, on peut même pas courir… Bref c’est un vrai trail à la Suisse quoi !” 

C’est vrai que faut pas « ripper », les rochers sont énormes et parfois ça glisse mais bon, ça passe et moi j’adore ces terrains. Après le passage du deuxième col à quelques 2900m d’altitude, tu plonges sur le lac de Louvie et le village de Fionnay. Alors seulement tu commences à comprendre la beauté du coin, en face le Grand Combin te fait un signe à travers les nuages. Tes petites jambes  commencent déjà à crier tellement tes genoux claquent les castagnettes… premier ravito, le délai est dans une heure, faut pas traîner dans le coin. Je m’envoie un bon bout de fromage, saucisse et pain et suis reparti pour 1200m de montée. Mon esprit prend le dessus, je dois m’accrocher au beau milieu de cette forêt, plus personne autour,  c’est désormais une alliance entre la nature et moi.

Les heures passent, les dénivelés s’enchaînent et gentiment la nuit m’engloutit avec le froid et le brouillard comme alliés. Je connais le chemin et commence à trembler malgré mes couches d’habits. Je vais le faire, faut accélérer, ça va me réchauffer. Minuit Champex lac, la redoutée. L’an dernier c’est ici que j’ai « serré », l’estomac en vrac sans rien manger et une grosse envie d’abandon… mais cette fois… et bin non, pareil, le gros coup d’assommoir. Ne pas rester ici, le mental est fort, se lever, repartir au plus vite avec les conseils de ma chérie, ça va passer !

C’est désormais plus de 60 km que j’ai bouffé, nouvel objectif Finhaut avant 8h du mat. Je suis seul depuis longtemps et la lutte avec le marchand de sable est continue, il ne doit pas gagner et moi je dois garder le chemin en vue. Les petits carrés brillent dans la nuit pour me guider comme une chaîne ininterrompue de petites lucioles venues m’encourager. Des marches d’escaliers en descente comme en montée sur les kilomètres suivants auront raison de moi et 20 min de repos me seront salvatrices.

Il est 7h, le jour se lève et je repars comme après une grosse nuit de sommeil, tous les feux sont au vert. Le soleil gagne du terrain et j’enlève mes couches superflues, la journée va être chaude mais radieuse. A mi pente sur la montée du col d’Emaney les premiers coureurs du 90 km me dépassent alors chacun y va de ses petits encouragements : Vas y t’es une machine, 170 bornes c’est pas de la tarte ! Et moi de répondre : Allez champion go, go, c’est magnifique ! L’ambiance est au top, j’en oublie presque toutes ces heures passées seul, mon moral est excellent. La mi-course est à portée de basquets.

Le team de suiveuses est incroyablement efficace, (ma chérie et une amie) sont aux petits soins pour moi de jour comme de nuit, à l’affût de mes moindres besoins et pile au bons endroits. Il s’en suivra encore des cols et des bosses, mais surtout cette big descente de 1600m de dénivelées sur Champéry qui va faire pas mal de dégâts. Bon nombre de concurrents stoppent à cette deuxième base de vie. De mon côté, je suis à fond, mes amis sont là pour moi. Je m’étais dit si j’arrive au 106èmekm, je la finis. C’est possible, on est samedi 16h et demain matin je peux être à l’arrivée. Je m’envoie une bonne bière et un hachis Parmentier, (bin quoi ? C’est recommandé sur tout les programmes d’entrainement, non ?)

Ne comptez pas sur moi pour bouffer des gels ou autre bars X ou Y. Ce sera des Pommpotes, des Bieberlis, (sorte de pain d’épices fourrés aux amandes adoré par les Suisses,) des sandwichs maison : beurre, moutarde, viande séchée et riz au curry avec du poulet, rien que des aliments qui font envie…

A Morgins un ami venu par surprise m’accompagne sur quelques kilomètres et c’est déjà le retour de la nuit. Mais je le sais bien, dès que le jour se lèvera, je serai au bout. Le reste est compliqué, ponctué d’errance à travers les forêts et d’hallucinations de toute sortes jusqu’à voir des animaux fantastiques, des gens ou des maisons là au milieu de rien. Mon esprit vagabonde et je lutte de toutes mes forces pour retrouver un peu de lucidité. Il faut suivre les lucioles, avancer quoi qu’il arrive…  Je quitte le dernier ravito vers 2h du matin C’est fait, reste 20 ou 25 kilomètres, je ne sais plus… deux montées et une grosse descente finale de 1200m vers l’arrivée. Je perds tous mes repères, je mange plus rien, je bois plus, mon corps ne peut plus s’arrêter ni reculer. Un regard sur ma montre, l’idée était de passer sous les 50 heures et franchement ça va le faire.

Soudain la délivrance plus rien en haut, le chemin descend. C’est passé, dans 2 heures je serai Finisher !!!

J’ai donc bouclé mon 5èmeultra à 7h53 au soleil levant en moins de 45h et ce fut une incroyable aventure. Merci à tout mes suiveurs !

En conclusion cette si belle phrase qui n’est pas de moi :

Nous devrions parfois faire ce qui nous rend heureux plutôt que ce qui est raisonnable.